À l'origine, cette image 1900 est un "Photochrome". Je l’ai choisie pour illustrer un passage du poème « La Vue » de Raymond Roussel lors de ma lecture. Le lieu exact peut être vérifié : Normandie ? Biarritz ? En tout cas, pas la Côte d’Azur, dont les ensembles hôteliers ou de jeux n’ont pas ce plain-pied avec la promenade de la plage… Vers 1890, ces photochromes se sont répandus, suite à la demande de l’industrie touristique naissante à la photographie noir & blanc : la couleur. Le procédé suisse « Photochrome » échappe aux aplats grossiers des coloriages que l’on rencontre encore en antiquités : divers objets « Souvenir » intégrant une vue colorisée d’un site touristique. Les couleurs sont finement délayées et apposées par des artisans, en dégradés respectant la gamme des gris d’une photographie et spéculant sur les couleurs réelles envisageables. Puis des passages multiples en imprimerie mécanique transcrivent ce travail pour en multiplier la possibilité de reproduction. Ainsi, le procédé photochrome descendra des montagnes suisses vers la France du Mont-Blanc, puis les Alpes, puis les plages normandes et le tourisme balnéaire. Il atteindra la Côte d’Azur, puis Istambul… En 1903, les frères Lumière déposeront le brevet des fameuses plaques photographiques dites « Autochromes », véritable transcription sensible des couleurs à la prise de vue. Cela n’empêchera pas, pour la diffusion touristique, sa coexistence avec les procédés moins coûteux du type Photochrome, dont le charme relève de nostalgies picturales… Je me souviens par exemple, jusqu’à la fin des années 60, des cartes postales « Yvon », dont la plupart étaient encore des prises de vues noir & blanc coloriées, avec des tuiles immanquablement trop rouges : tentative de remise à neuf permanente du réel par l’idée, que l’on peut rapprocher au fond d’une certaine démarche poétique…
Jean-François Jung
2 Responses to test photo